By Maurice LeGoy
Essayez donc de mettre un peu de beurre cru ou de crème fraîche dans vos épinards Les acides linoléiques conjugués (ou CLA) sont des anticancéreux naturels. Ce sont des acides gras naturels qui sont présents dans certaines denrées alimentaires. Il y en a en particulier des teneurs élevées dans le lait et la viande des ruminants. Ces acides sont fabriqués dans le rumen par des bactéries.
Par conséquent, la seule façon pour l’homme d’absorber des CLA est de consommer du lait ou de la viande de bouf. Ces CLA se sont révélés être de puissants anticancéreux chez les animaux de laboratoire.
La mode alimentaire actuelle des aliments allégés a fait que les gens ont diminué leur ingestion de CLA. Pourtant des études récentes montrent que les CLA ralentissent le développement de certains cancers, celui des maladies cardio-vasculaires, tendent à réduire la quantité de graisses corporelles et augmentent le volume de la masse musculaire maigre.
Le Docteur Tilak Dhiman, scientifique de l’Université de l’Utah, étudie actuellement les moyens d’augmenter la quantité de CLA présentes dans le lait, la crème et les fromages. “Il faut distiguer les différents types de graisses. Nous avons tendance à croire que toutes les graisses ne sont pas bonnes pour la santé. Mais la science de la nutrition est complexe et nous sommes bien loin de tout savoir sur la question!”
Le Docteur Dhiman, et nombre d’équipes d’autres chercheurs également, ont montré que la teneur en CLA des graisses du lait est jusqu’à cinq fois plus élevée chez les vaches au pâturage, ern particulier à l’herbe ou au ray-grass, que lorsqu’elles consomment des rations à base 50% de fourrages ensilés, comme la luzerne ou l’ensilage de mais, et de 50% de grains.
Les chercheurs ont aussi découvert qu’en distribuant plus de foin dans les rations, la teneur en CLA du lait et de la viande augmentent aussi, mais moins que sur les vaches au pâturage d’herbe.
Selon le Docteur Dhiman, il se peut qu’il y ait dans l’herbe des substances qui favorisent la croissance de certaines variétés de bactéries, et que ces bactéries fabriquent des CLA en plus grande quantité.Il se peut aussi que les animaux au pâturage aient un équilibre microbien dans le rumen différent de celui des animaux en stabulation.
“Nous avons diminué considérablement notre consommation de CLA quand nous avons modifié l’alimentation de nos vaches laitières ” note le Docteur Dhiman. Il fait aussi remarquer qu’il y a 50 ans, la plupart des vaches laitières étaient au pâturage. A présent leur nourriture est contrôlée, mais cela pourrait bien avoir eu un effet très négatif sur la santé des gens. ” Aujourd’hui on produit plus de lait avec des rations mélangées en stabulation. Mais nous devons garder en tête les problèmes de la qualité de ce que nous produisons en matière de lait et de viande.”
Le Docteur Dhiman a aussi découvert que la quantité de CLA du lait peut être augmentée dans les rations mélangées en supplémentant ces rations à base de luzerne et d’ensilage de maïs avec des graines de soja cuites et concassées. L’addition de 2% d’huile de soja ou de lin à la matière sèche de la ration permet d’obtenir des teneurs en CLA dans le lait des vaches ainsi alimentées proche de celles des vaches au pâturage. Mais cette addition se traduit par une diminution de la digestibilité de l’alimentation . Le Docteur Dhiman a aussi montré que l’extrusion des graines entières de soja ou de coton permet de doubler la teneur en CLA du lait. La teneur en CLA plus élevée dans le lait permet de fabriquer des fromages à teneur aussi plus élevées en CLA, car ils semblent très stables.
La teneur en CLA du lait est de l’ordre de 4 à 5 milligrammes par gramme de graisse. Plus le taux butyreux est faible et moins il y a de CLA dans le lait.
Le contenu en CLA des diverses graisses d’origine animale est le suivant (en milligrammes par gramme de graisse) :
- Agneau 5,5 mg
- Viande de bouf 4,0 mg
- Dindon 2,5 mg
- Poulet 0,9 mg
- Porc 0,6 mg
- Poisson 0,3 mg
Les graisses laitières et la santé
Parodi a résumé succintement la contribution des composants des graisses laitières de la vache comme agents anti-cancéreux potentiels. L’agent anticancéreux le mieux caractérisé à l’heure actuelle est l’acide linoléique conjugué, terme générique pour un groupe d’isomères diénoïques conjugués (possédant deux doubles liaisons) de l’acide linoléique. Le mieux connu, et aussi le plus abondant dans le lait des vaches, est le cis9-trans-11 acide octodécanoïque (acide gras à 18 atomes de carbone). On lui a donné le nom d’acide ruménique, parce qu’on le trouve en abondance dans la graisse des ruminants et que c’est un intermédiaire de la biohydrogénation de l’acide linoléique dans le rumen.
Dans le modèle souris, les CLA se sont montrés efficaces pour protéger contre l’induction et le développement des tumeurs de la peau, de l’oesophage, du colon, de la prostate et de la mamelle. Tout récemment, on a montré que des souris nourries avec du beurre durant la période précédant la puberté avaient des teneurs tissulaires en CLA plus élevées, une quantité de cellules épithéliales mammaires inférieure et une apparition des tumeurs mammaires induites chimiquement réduite de 53%; (Ip et Al, 1999). Il a été démontré que les CLA inhibaient la prolifération des cellules bourgeonnantes, qui sont la cible des agents de la cancérisation mammaire. Le beurre enrichi en CLA “naturels” présentait une plus grande efficacité qu’une dose égale de CLA d’origine synthétique.
L’explication proposée serait que la concentration en CLA plus importante au niveau des tissus observée lors de l’alimentation avec du beurre était due à une synthèse endogène de CLA, grâce à la désaturation de l’acide vaccénique (trans11 C18:1) dont le pourcentage dans la graisse du lait est 5 fois plus importante que l’acide ruménique. L’étude a aussi démontré que l’isomère cis9-trans11 etait aussi biologiquement un agent anti-cancéreux.
L’efficacité des autres isomères reste à démontrer.
L’acide vaccénique (du latin vacca, la vache), qui est fréquent spécialement dans la graisse des ruminants, représente à peu près 2% du total des acides gras du lait, soit 4 à 5 fois la quantité de CLA de la matière grasse et on peut l’augmenter jusqu’à 10% en jouant sur l’alimentation des laitières. C’est un précurseur très important des CLA utilisables par notre organisme. Il est désaturé par une 9-désaturase en acide ruménique . Nous avons montré que 50% de l’acide vaccénique stocké dans les tissus des souris est désaturé par ces animaux (Santora et Al, 2000). Il est aussi désaturé dans la glande mammaire des vaches laitières, contribuant ainsi à la fabrication de 2/3 des CLA du lait (Grinari et Al, 2000). La désaturation peut aussi avoir lieu en moindre proportion dans le tissu adipeux (Palmquist et Al, 2000). L’ingestion de CLA dans les rations américaines contemporaines classiques est comprise entre 100 et 200 mg/jour (McGuire et Al, 1999). L’acide vaccénique du lait et des produits laitiers pourrait aisément au moins doubler la quantité utilisable par l’organisme de l’homme. Nous sommes actuellement en cours d’études avec l’Université d’Helsinski pour déterminer le degré de désaturation de l’acide vaccénique chez l’homme.
Bien que l’acide vaccénique ait attiré beaucoup d’attention de la part des scientifiques spécialisés dans les produits laitiers, la nutrition et la médecine, d’autres composants du lait ont aussi des effets biologiques avec des propriétés anti-cancéreuses. La sphingomyéline en particulier, présente dans la membrane des globules gras, et dont le babeurre est particulièrement riche, contient des composant biologiquement très actifs, comme la céramide et la sphingosine. Ils sont utilisés dans trois mécanismes antiprolifératifs en inhibant la croissance cellulaire et en facilitant l’apoptose (mécanisme programmé de la mort cellulaire).
L’acide butyrique du lait représente 3 à 5% des acides gras du lait, et 10% des molécules d’acides gras qui ont une puissante action inhibitrice de la croissance cellulaire et qui induisent l’apoptose de plusieurs lignées cellulaires de cancer. La plus grande attention lui a été donnée pour son rôle dans la prévention du cancer du colon. L’efficacité la plus grande du butyrate semble associée à la distribution conjointe de vitamines liposolubles (Parodi, 1997). Les preuves définitives sur l’efficacité du butyrate comme agent anti-cancéreux restent à administrer.
Les esters lipidiques présents dans les graisses du lait sont facilement absorbés et présentent des propriétés anti-cancéreuses in vitro sur les cultures de cellules. Mais aucune efficacité n’a été démontrée dans les essais cliniques (Parodi, 1997).
Parodi (1997) a noté un certain nombre de preuves partielles de la diminution du déclenchement (induction) des tumeurs sur les animaux d’expérimentation nourris avec du beurre en comparaison avec d’autres types d’huiles ou de graisses. Un aspect particulier est la preuve que les CLA administrés avant la puberté peuvent donner une protection de longue durée contre l’induction et le développement des tumeurs. Peut-être est-ce là le résultat d’une inhibition par les CLA du développement du bourgeon terminal (Ip et Al, 1999).
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